LE CRI DE MERLIN


_D'après Marie-Louise von Franz_


1. Le Mal, l'Ombre et la Projection


* Le Mal et l'ombre:

La figure de Merlin incarne la réconciliation des contraires (présents chez tous) : il est le fils du diable mais né d'une mère chrétienne très pieuse, il porte en lui ces deux dimensions opposées.


Dans le développement de la théologie chrétienne, la tendance optimiste consiste à nier le mal, à le réduire à une simple absence de bien (_privatio boni_). Or le grand problème moderne demeure celui du mal, et pour chaque individu, celui de l'ombre.


Lorsque l'on ignore le mal, le danger majeur réside dans sa projection sur autrui ou dans la commission d'actes involontairement destructeurs : agir avec de bonnes intentions d'une main tout en défaisant tout de l'autre, par de petits gestes que l'on se dissimule à soi-même.


* Projection :

Selon Jung, on ne peut parler de projection qu'à partir du moment où elle est reconnu et donc au moment de la retirer. Certains signes nous y invitent : incertitude, fanatisme, exagération émotionnelle... Autant de symptômes qui doivent alerter. Ainsi par exemple on peut se demander :


_« Pourquoi Untel m'irrite-t-il autant ? Il n'est peut-être pas très sympathique, mais ma réaction est démesurée. »_


Si l'on s'agite sans raison apparente, il peut s'agir d'une projection : ce qui nous agace chez l'autre réside en réalité en nous-mêmes. Quand on reconnaît cela avec honnêteté, l'autre devient ordinaire et les relations se normalisent.


Le désordre du monde est en nous. Nous portons la responsabilité des conflits, des violences et de ce qui dysfonctionne dans le monde. L'humain tend à penser : « Ce sont les autres ! Moi, j'ai de bonnes intentions… ». Mais une irritation excessive révèle souvent une projection.


2. Rêve, Inconscient et Mythe personnel


Il est essentiel de travailler sur l'ombre. Ce n'est qu'en franchissant cette porte difficile — celle de la confrontation avec ce qu'on a refoulé — que l'on accède au ciel intérieur, c'est-à-dire aux couches les plus pures de la psyché, non souillées par les affects névrotiques.


* les chemins du rêve:

Le rêve, lorsqu'on sait le lire, offre des indications précieuses sur le chemin à suivre.


Les portes de l'inconscient ouvrent sur deux royaumes : d'un côté, l'inconscient collectif, riche de mémoires ancestrales et tribales ; de l'autre, le fleuve de notre vie personnelle. En pratique, les rêves mêlent ces deux dimensions. Ils sont rarement purement archétypiques ou uniquement personnels.


L'analyse commence souvent par des rêves personnels, mais peu à peu, l'archétypique émerge. Nous entrons alors dans la mythologie. Après un long travail sur l'intime, c'est le mythe qui se manifeste.


* Le mythe du névrosé:

Lorsqu'une personne découvre son mythe, elle trouve sa créativité et sa place dans le monde. Elle est alors véritablement guérie, car la pire des névroses n'est pas le symptôme lui-même, mais la perte de sens.


_« Dans les grandes analyses, il s'agit toujours de découvrir le mythe propre à la personne, ainsi que le sens, la créativité et la place qu'elle peut occuper dans la société. (...) On ne crée pas un mythe consciemment. Il est en nous, et c'est en plongeant dans les profondeurs que nous pouvons le remonter. »_


**Quel est mon mythe ?** — Voilà la découverte essentielle à laquelle mène une introspection authentique.


3. Pulsions et Instincts


Il est nécessaire d'élargir l'approche freudienne classique. En effet, si l'on ne considère que les pulsions instinctuelles, on néglige les pulsions spirituelles présentes dans l'inconscient.


Même sur le seul plan des instincts, Jung affirme que la faim et le besoin de nourriture sont plus fondamentaux que la sexualité. Chez l'homme primitif, les conversations portent essentiellement sur la nourriture, bien plus que sur la sexualité.


Adler a mis en lumière l'instinct de domination. Aujourd'hui, nous savons que l'impulsion vers le pouvoir constitue une force psychique majeure.


Jung identifie également l'impulsion d'individuation — le besoin de devenir soi-même — comme la plus forte de toutes. Elle dépasse les instincts de survie ou de domination.


 4. Alchimie, Psyché et Matière


L'alchimie constitue un langage unique, car elle relie psyché et matière, il s'agit d'un langage créateur.


L'alchimie est **le mythe de la matière** : elle s'est consacrée à l'exploration de la matière et du principe féminin. Elle compense ainsi ce qui a été négligé dans la tradition chrétienne.


Pour les alchimistes, la matière n'était pas inerte. Ils croyaient à l'_anima mundi_, à l'idée que la matière possède une psyché, et que notre propre psyché lui est liée. Ils cherchaient cette correspondance dans le corps.


Par la méditation intérieure, les alchimistes entraient en contact avec la matière à travers leur propre corps.


Chez Paracelse, l'alchimie se centre sur le firmament intérieur : une perception psychique du corps. Il évoque le ciel intérieur. L'Orient partage cette vision : à travers le yoga, on entre en relation avec son corps par l'introspection — c'est une forme d'alchimie.


L'alchimie est donc une voie introvertie : elle vise à contacter la matière à l'intérieur de soi-même.


5. Névrose, Pathologie et Guérison


La névrose constitue une forme d'autodestruction : on se combat soi-même. Elle a souvent des causes personnelles : histoires d'enfance, traumatismes ou influences négatives.


Le névrosé se place lui-même dans sa propre lumière et se gêne : cette situation est guérissable.


Les pathologies plus graves, comme la schizophrénie, peuvent aussi être traitées par la psychothérapie selon les jungiens — mais cela demande dix ans d'un travail acharné.


On y affronte des forces intérieures profondément destructrices. C'est un combat corps à corps, à la manière d'un exorciste luttant contre le diable.


_« Souvent, en traitant des schizophrénies, surtout des paranoïas, je me suis dit : c'est une bataille avec le diable que nous menons ensemble. »_


Je l'ai dit aux patients, avec précaution. Et avec du temps, de la dévotion, on peut guérir.


Mais il y a un au-delà : ce que l'Église catholique appelle le _mysterium iniquitatis_, le mystère du mal. On le rencontre rarement — mais cela arrive. Et quand cela se produit (par exemple face à un tueur en série), je fuis, je fais le signe de croix et je fuis. Ce serait de la _hybris_, de l'inflation, que d'essayer de comprendre cela.


6. Individuation et Voie Jungienne


La voie jungienne ne prétend pas mener tous les patients vers les mêmes sommets. Chaque individu possède ses nécessités intérieures qu'il convient de respecter.


Le processus d'individuation — cette tendance naturelle vers la réalisation de soi — ne suit pas un chemin unique ou prévisible. Certains iront plus loin que d'autres dans l'exploration des profondeurs psychiques. Chaque expérience de vie est unique.


_« Beaucoup de patients ne rencontrent jamais le Soi. Nous n'empruntons pas une voie directe, mais avançons à petits pas, aussi loin que l'individu peut aller. Là où il souhaite s'arrêter, il s'arrête. »_


Cette approche respectueuse évite l'écueil de l'inflation thérapeutique. Le thérapeute n'impose pas sa vision du développement spirituel, mais accompagne chacun selon ses aspirations profondes.


_« Si quelqu'un ne veut pas vivre d'expériences mystiques intérieures, nous ne les lui imposons pas. Nous soignons sa névrose, et nous allons aussi loin que ses nécessités intérieures le permettent. »_

Interview de Marie-Louise von Franz, réalisée par Susan Wagner à Bolligen, entre mars 1977 et septembre 1979.


Le retrait de projection : reprendre ce qui nous appartient


La projection est ce phénomène inconscient par lequel nous attribuons aux autres ce qui se joue en réalité en nous. Par exemple, percevoir un collègue comme agressif peut révéler notre propre colère refoulée.


Le retrait de projection inverse ce processus : il s'agit de reconnaître que ce qui nous dérange chez autrui fait écho à quelque chose en nous. Cette prise de conscience n'arrive généralement pas par un simple effort de volonté. Elle émerge souvent à la suite d'un événement émotionnellement marquant - un conflit, un malentendu persistant, une irritation récurrente - qui nous amène à nous questionner : "Pourquoi cette situation m'affecte-t-elle tant ? Pourquoi cette personne provoque-t-elle de si fortes réactions chez moi ?"


Ces questionnements signalent le début du retrait de projection : nous commençons à reconnaître qu'une partie de ce que nous critiquons chez l'autre nous concerne directement. Mais cette compréhension ne peut rester purement intellectuelle. Elle demande une exploration intérieure authentique : accueillir l'inconfort ressenti, observer nos réactions internes, écouter notre dialogue intérieur critique ou colérique, et comprendre ce qu'il révèle de notre propre fonctionnement.


Ce processus de prise de conscience peut se faire de manière autonome pour les personnes qui cultivent une attention particulière à leur vie intérieure. Cependant, il exige une sincérité totale envers soi-même et le courage d'explorer des aspects de notre personnalité que nous préférons habituellement éviter.


L'alchimie comme nouveau souffle mythologique


Toute civilisation a besoin d'un récit fondateur pour maintenir sa vitalité et sa cohésion. L'histoire nous montre les conséquences dramatiques de la destruction de ces mythes structurants : quand les récits traditionnels s'effondrent, c'est tout l'équilibre social qui vacille, comme l'illustrent tragiquement les peuples dont les missionnaires ont détruit les croyances ancestrales, provoquant désorganisation sociale et perte de repères.


En Occident, le mythe chrétien a longtemps joué ce rôle unificateur. Aujourd'hui cependant, il semble avoir perdu de sa force d'attraction et ne résonne plus auprès du plus grand nombre. Sa vision, devenue trop partielle, néglige des aspects fondamentaux de l'expérience humaine.


Le mythe alchimique pourrait offrir une alternative enrichissante, voire compléter le récit chrétien en l'approfondissant. L'alchimie propose un parcours symbolique qui embrasse ce que le christianisme tend à éviter : l'engagement direct avec la matière, la confrontation avec le mal, l'exploration complète du féminin - y compris ses aspects obscurs que la tradition chrétienne préfère ignorer ou condamner.


Là où le christianisme privilégie la pureté et incarne le bien absolu, il peine à intégrer la complexité des opposés. Il célèbre un féminin épuré (incarné par la Vierge Marie) tout en écartant les figures féminines plus nuancées. Il manifeste une méfiance envers la matière, souvent perçue comme source d'impureté ou de tentation. L'alchimie adopte la démarche inverse : elle s'immerge dans la matière, établit un dialogue avec elle, et vise la réconciliation des contraires. Elle nous propose une voie symbolique d'intégration des opposés, à l'image de la figure emblématique de Merlin.


> " Vous savez, pour coopérer avec vous, la matière a besoin d'une attention affectueuse, et pas seulement technique, comme une lubrification. Vous devez en quelques sortes vivre avec elle, sinon elle vous joue des tours. (...) En fait, nous devons raviver les superstitions primitives."


L'animus : quand le féminin se perd dans l'imitation du masculin


L'héritage du mythe chrétien a créé chez de nombreuses femmes une rupture avec leur essence féminine. En dévalorisant certaines dimensions du féminin, cette tradition a ébranlé la confiance naturelle des femmes en elles-mêmes. Pour compenser cette perte, beaucoup se sont inconsciemment tournées vers l'adoption de comportements masculins, s'identifiant à ce que Jung nomme **l'animus**.


Cette identification se manifeste par une attitude rigide, une hyperrationalité, une façon d'être qui mime le masculin de manière souvent exagérée. Il ne s'agit pas d'un choix délibéré, mais de la conséquence d'un déséquilibre profond : ces femmes ont perdu foi en leur propre nature féminine.


Le défi ne réside donc pas principalement dans les relations avec les hommes extérieurs, mais dans la gestion de cette figure intérieure qu'est l'animus, qui peut entraver une femme de l'intérieur. La solution ne consiste pas à le combattre, mais d'abord à reconnaître sa présence, puis à lui redonner sa fonction véritable. Car l'animus, bien intégré, constitue **une source majeure de créativité**. Jung encourageait d'ailleurs les femmes à cultiver une pratique créatrice - artistique, intellectuelle ou artisanale - permettant à l'animus d'exprimer son potentiel positif : servir de pont entre la conscience et l'univers intérieur, l'inconscient.


Quand il reste mal reconnu, l'animus se transforme en simple répétiteur intérieur. Dans le milieu académique par exemple, il pousse à reproduire mécaniquement les idées d'autrui, à accumuler les références sans jamais développer une pensée personnelle. Arrive alors le moment de se demander : _"Mais moi, que pense-je vraiment ?"_ - et parfois, la réponse fait défaut.


L'expression allemande _schöpfen_ - "puiser de l'eau avec un seau" - illustre bien la nature de la pensée authentique : aller chercher dans ses propres profondeurs. C'est un processus exigeant, mais c'est précisément là que l'animus peut devenir un allié : il aide à remonter ces eaux profondes à la surface.


La difficulté majeure reste de **détecter quand on est sous l'emprise de l'animus**. Cette prise de conscience n'est pas immédiate. On croit être authentique, puis des signaux apparaissent - une tension corporelle, un changement de tonalité vocale, une raideur dans les épaules... Souvent, l'entourage le perçoit avant nous. Ainsi, quand une femme éprouve des difficultés relationnelles récurrentes avec des hommes lors d'interactions banales, que surgissent agacement ou irritation sans motif apparent, il se peut que l'animus se soit substitué à sa voix authentique. Ces hommes, sans connaître la psychologie jungienne, ressentent intuitivement cette fausseté. Ils ne comprennent pas l'origine de leur malaise, mais y réagissent - souvent par la colère.


La synchronicité : un ordre au-delà de la causalité


Comprendre le concept jungien de _synchronicité_ nécessite de s'affranchir temporairement de notre logique causale habituelle pour adopter une approche plus intuitive, semblable à celle des sociétés dites "primitives". Cette capacité de perception demeure présente en chacun de nous. L'enjeu n'est cependant pas de régresser vers une pensée magique, mais de la dépasser pour parvenir à une compréhension rigoureuse de la synchronicité - une approche qui complète la science plutôt que de la rejeter.


La synchronicité ne relève pas de la magie, mais constitue un principe d'organisation sans causalité. Jung illustre ce concept par un exemple physique : la désintégration radioactive. L'uranium possède une _période_ définie - le temps nécessaire pour que la moitié de ses atomes se transforment en plomb. Ce phénomène se mesure avec une précision absolue, pourtant nous ignorons **pourquoi** cette durée a cette valeur spécifique plutôt qu'une autre. Aucune cause identifiable n'explique ce délai. Nous ne pouvons que constater : _c'est ainsi_. Il s'agit d'une loi naturelle acausale.


Notre univers mental présente des phénomènes analogues. Le chiffre 6 offre un exemple frappant : c'est le seul nombre obtenu aussi bien par l'addition (1+2+3) que par la multiplication (1×2×3) des trois premiers entiers. Pourquoi possède-t-il cette propriété unique ? Aucune explication causale n'existe. C'est un fait mathématique. De même, personne ne peut expliquer pourquoi la vitesse de la lumière a précisément sa valeur actuelle. Elle est ce qu'elle est.


Jung postulait que l'esprit humain était structuré pour percevoir ces formes d'ordre acausal, présentes simultanément dans la nature et dans la psyché. La _synchronicité_ représente une manifestation particulière de cet ordre : le moment où un **événement psychique intérieur** et un **événement extérieur** coïncident de façon significative, sans lien de cause à effet. De cette rencontre émerge quelque chose **de nouveau**, un sens inédit.


Le physicien Fritjof Capra, dans _Le Tao de la physique_, établit des parallèles entre ce concept et certains aspects de la physique quantique. Il évoque notamment les _singularités_ : événements totalement imprévisibles, comme l'apparition spontanée d'une particule. Bien que les lois probabilistes permettent de nombreux calculs, elles ne peuvent prédire ces phénomènes. Impossible d'anticiper leur moment ou leur modalité d'apparition. Ils surgissent, simplement.


Les événements synchronistiques partagent cette nature avec les singularités quantiques. Ils échappent aux lois de causalité tout en portant un sens profond. Inexplicables par une logique séquentielle, ils touchent néanmoins intensément ceux qui les vivent.


Faire face à son ombre : un rempart contre les dérives collectives


Si les discours sur la paix et la tolérance suffisaient à éradiquer le mal, l'humanité aurait résolu ses problèmes depuis longtemps. En réalité, le mal ne peut être véritablement combattu qu'**en nous-mêmes**.


L'idée de "sauver le monde" relève de l'illusion. Confronter directement un dictateur à ses démons intérieurs mène à l'échec. Le véritable travail s'accomplit dans l'intimité, dans nos profondeurs. Cela ne signifie pas renoncer à exprimer ses convictions - nous pouvons et devons le faire - mais comprendre que le combat essentiel se livre ailleurs : **dans notre propre intériorité**.


Ce n'est pas un énième manifeste qui transformera les périodes chaotiques. En revanche, aider une seule personne d'influence à reconnaître son ombre - un responsable politique par exemple - peut avoir un impact bien plus concret que des manifestations quotidiennes.


Jung distinguait deux dimensions de l'ombre : l'ombre **personnelle** et l'ombre **collective**.


**L'ombre personnelle** englobe tout ce que nous refusons d'admettre chez nous : jalousie, envie, avidité, paresse, soif de pouvoir, petites lâchetés. Ces aspects ne constituent pas des forces démoniaques, mais simplement les facettes humaines que nous avons refoulées parce qu'elles contredisent l'image que nous souhaitons projeter.


**L'ombre collective** touche à une dimension plus profonde et obscure : le versant sombre de l'archétype du Soi, que les traditions religieuses ont souvent personnifié en figure diabolique. Elle opère à l'échelle des groupes, des sociétés et des religions.


Ces deux ombres s'entremêlent : l'ombre personnelle peut devenir une **voie d'accès** vers l'ombre collective. L'Allemagne nazie illustre tragiquement ce franchissement. De nombreuses personnes ont cédé à leurs peurs, leurs intérêts personnels, leur besoin de sécurité ou d'appartenance. Sans être intrinsèquement monstrueuses, elles ont ainsi servi un mal collectif qui les dépassait largement.


**Connaître son ombre personnelle constitue une protection contre ces dérives.** C'est une manière de "verrouiller la porte au mal". Celui qui sait identifier ses propres failles et zones d'ombre résiste mieux aux mouvements de foule, aux idéologies extrémistes et aux psychoses collectives.


Chaque société porte ses idéaux, mais aussi **son ombre collective**. Plus il existe d'individus conscients de leur propre ombre, plus cette société a de chances d'éviter les mouvements destructeurs. Sinon, elle bascule dans la folie collective, où des personnes "ordinaires" en viennent à tuer sans éprouver de culpabilité.


Se confronter à son ombre représente un processus profondément inconfortable. Il ne peut s'accomplir dans des groupes ou lors de déclarations publiques. Déclamer "je suis envieux" devant autrui reste relativement facile, mais explorer en soi _où_ cette envie opère, quels effets elle produit, en ressentir la honte ou la souffrance est une autre histoire. 


C'est pourquoi **la relation humaine** demeure essentielle dans ce processus. Il faut quelqu'un pour accompagner et soutenir cette démarche. Affronter seul son ombre comporte le risque de l'effondrement: quand l'ombre est authentiquement reconnue, un **bouleversement intérieur** se produit. Elle ne peut plus être oubliée. Ce n'est plus un concept abstrait, mais une partie de soi désormais connue - et qui ne pourra plus être ignorée.